WEST HAM

Tiré de « Une vie pour rien ? » n°4

Le club de West-Ham United a été fondé en 1895 par une entreprise spécialisée dans le travail du fer (d'où le nom de l'équipe). Après avoir évolués dans un stade de 100.000 places pendant plusieurs années, les Hammers (ou Irons) s'installent définitivement à Upton Park en 1904. Ils jouent alors à un niveau assez bas mais montent en 2nde division juste après la première guerre mondiale. Lors de la saison 1922-23, ils obtiennent leur meilleur résultat puisqu'ils atteignent la finale de la cup qu'ils perdent à Wembley face à Bolton.

Par la suite, ils vont évoluer à différents niveaux mais ne remportent qu'un trophée en 1940. C'est en fait à partir des années 60 que tout commence réellement. West-Ham gagne une nouvelle fois la FA cup en 1964 ce qui lui permet d'intégrer la coupe d'Europe qu'il remporte face au TSV Munich à Wembley. Si cela permet au club de gagner une certaine reconnaissance médiatique, elle n'est rien comparée à celle de Liverpool ou de Manchester. Au niveau des supporters, c'est la même chose : l'ambiance n'est pas exceptionnelle à Upton Park et les incidents s'ils existent, sont le plus souvent provoqués par les supporters visiteurs ou lors de derbys houleux contre Chelsea ou Arsenal. Ce constat peut d'ailleurs s'appliquer à la majorité des clubs de Londres qui ne bénéficient pas des résultats ni du soutien du public des grands clubs du nord du pays.

En fait c'est à partir de 1970 que les violences se font plus régulières. Les résultats aidants, les fans londoniens commencent à ébranler l'hégémonie des clubs “ historiques ” britanniques. En 1975, West-Ham connaît une bonne saison avec une nouvelle victoire en cup, les supporters sont à ce moment là assez nombreux et commencent à s'organiser. Ainsi durant cette saison, les hools de West-Ham créent l'Inter City Firm. L'origine de ce nom est sujet à controverse. Si certains pensent que sous ce nom se regroupaient “ des gens bien sous tout rapports qui travaillaient à la banque la semaine et qui se battaient chaque week-end”(Personnellement, je pense que cette idée est née d'une mauvaise traduction faite par certains journalistes européens ne connaissant pas précisément le sujet et ayant mis l'ICF en rapport avec la “ city ”, le quartier des affaires de Londres), la plupart affirme plus simplement que ses membres se sont inspirés du nom du réseau de train (Inter City) qui les transportait chaque week-end pour accéder aux différents stades. En tout cas, c'est très rapidement que tous les hooligans de West-Ham seront catalogués sous ces trois lettres : ICF.

Le 25 octobre 1975, West-Ham accueille Manchester de retour d'une saison au purgatoire de la division inférieure. Le match donne lieu à de nombreux incidents et est interrompu à plusieurs reprises. Le bilan de la soirée fera état de nombreux blessés essentiellement dans les rangs de la Red Army de Manchester.C'est une des premières fois que les supporters de Manchester sont défaits, en tout cas, de cette manière et cela constitue le premier réel “ fait de guerre ” des Hammers. Les incidents continuent d'ailleurs jusqu'à la fin des années 70 avec des bagarres, saccages ou envahissements de terrain mais pas plus que dans les autres stades anglais.

Dès le début des années 80, on assiste à un réel changement au niveau des supporters et surtout à une hausse de la violence dans toute l'Angleterre et principalement à Londres. A West-Ham, ce changement va être plus marqué qu'ailleurs car accentué par un événement totalement extra-sportif. En effet, en mai 1980, les Hammers remportent une nouvelle fois la coupe d'Angleterre. A l'occasion de l'accession de la finale, les Cockney Rejects sortent un 45T hommage à l'équipe londonienne, “ I am forever blowing bubbles ! ”, l'hymne du club. Si à ce moment il n'y a pas plus de skins à Upton-Park que dans les autres stades, cela va rapidement changer. Certains supporters se rendent aux concerts des Cockney Rejects mais surtout dans l'autre sens de nombreux skins, particulièrement dans l'east-end mais aussi dans le reste de Londres, portent les couleurs de West-Ham et renforcent les rangs de l'ICF. Cette évolution du public va bien sûr être l'un des facteurs de l'augmentation de la violence.

Dès la saison suivante on peut se rendre compte de cette hausse de la violence. Ainsi lors d'un déplacement de West-Ham à Madrid pour jouer contre Castilla, la tension importante qui règne avant le match débouche sur des bagarres avec les supporters adverses puis la police. Résultat un mort. De la même manière, en 1982, des bagarres éclatent dans les tribunes de Highburry pour Arsenal-WHU. Le terrain est envahi et les incidents se poursuivent hors du stade. On relèvera une nouvelle fois un mort (coups de couteau) supporter des Gunners. Près de lui on retrouvera la carte de visite dédicacée par l'ICF. Ce phénomène de “ cartes de visites ” est alors très prisé à Londres et les autres groupes que ce soit les fans de Chelsea ou les Bushwackers de Millwall n'hésitent pas à signer de la même manière leurs méfaits.

Le nombre d'incidents s'amplifient toujours avec les années, ainsi en 1984 à Birmingham, le terrain est envahi deux fois avec une centaine d'arrestations, la même année c'est à Chelsea que se produisent des incidents dans les tribunes avant le match... C'est à peu près à ce moment là que les supporters de West-Ham se radicalisent politiquement. Dans pas mal de clubs anglais, certains supporters ont toujours été plus ou moins proches des partis d'extrême droite. Mais le fait qu'à West-Ham une partie importante des supporters est skin (à une époque où une bonne partie sera récupérée par le NF) augmente sans doute cette radicalisation surtout lorsque l'on sait que Ian Stewart se dit lui même assez proche des Hammers. On peut aussi ajouter que l'East-end où se situe Upton Park a toujours été l'un des fiefs de l'extrême droite anglaise.

A cause de cette radicalisation politique, mais aussi à cause de l'interdiction de coupe d'Europe pour les clubs anglais prononcée au lendemain du Heysel, les Londoniens sont à cette époque très présents dans le sillage de l'équipe nationale. Les Hammers n'échappent bien sûr pas à la règle. Ainsi à l'occasion d'un France-Angleterre en février 1984, des incidents éclatent à bord du ferry qui les transporte chez nous, entre fans de West-Ham et de Chelsea. A leur arrivée à Paris c'est contre les skins parisiens qu'ils se retourneront avec à la clé des bagarres police-Anglais-Français avant, pendant et après le match. Des scènes inimaginables aujourd'hui se déroulent à l'intérieur du Parc des Princes, celles-ci seront diffusées à la télé française qui découvre le phénomène hooligan. Des voitures seront saccagées ainsi que des bars pour aboutir à plusieurs blessés et de nombreuses arrestations dans les deux camps. Il fallait préciser que le match devait être amical...

Deux ans plus tard, c'est à nouveau à l'occasion de matchs amicaux de leurs équipes respectives aux Pays-Bas que des supporters de WHU et de Manchester se retrouvent sur le ferry “ Beatrix ” qui se souviendra de leur passage. Des bagarres éclatent pendant toute la nuit que dure le voyage, quelques arrestations seront effectuées à l'arrivée mais cela n'empêche pas de nouveaux incidents en Hollande. C'est sans doute l'année la plus violente en Angleterre et ce n'est pas par hasard si cette même année 1986 à Everton, un supporter des Hammers est retrouvé tabassé ce qui lui vaudra 116 points de suture.

Durant les années suivantes, de nombreux incidents continueront à suivre West-Ham en déplacement. En plus des rencontres plus ou moins amicales faites dans le centre-ville de Londres, les virées en province sont souvent assez chaudes. En effet, les Hammers sont très attendus à cause de leur réputation skin sans pour autant être plus actifs que les fans de Leeds ou surtout de Millwall.

Depuis dix ans et la catastrophe d'Hillsborough, les incidents sur le territoire britannique sont beaucoup plus rares du fait de la hausse du nombre de flics et des nombreuses interdictions de stade mais au cours de ces dernières années les Hammers se sont encore fait remarquer. Ils ont envahi à plusieurs reprises le terrain d'Upton Park notamment lors de leur élimination prématurée de la cup face à Wrexham (janvier 97). La saison dernière, David Beckham a fait les frais de sa prestation en coupe du monde, il a été pris à parti avant le match pendant que près de 500 supporters essayaient de charger le car des joueurs lors de la venue de Manchester. En 1999, lors de la venue de Leeds, à la mi-temps, l'arbitre a dû regagner son vestiaire sous escorte policière après avoir expulsé 3 joueurs de West-Ham. Avec l'équipe d'Angleterre, les hammers sont aussi toujours présents et actifs. On a pu voir plusieurs étendards portant les marteaux croisés de West-Ham lors des violents incidents d'Irlande-Angleterre avant l'Euro 96 ainsi que pendant les matchs qui ont suivi jusque sur la Cannebière lors de la CM 98.

Aujourd'hui, on peut dire que West-Ham fait partie des clubs qui ont marqué l'histoire des fans de foot en Europe. S'ils n'ont jamais été très en vue au niveau des résultats sportifs, les Hammers ont marqué les supporters toutes tendances confondues et pas seulement les skins et les hooligans. En France, les devils de Bordeaux (pourtant très clean) n'ont pas hésité pendant un bon moment à afficher un drapeau britannique frappé du sigle de l'équipe londonienne et le nom “ Urban service ” à Nantes ne sonne pas très neuf. De même de Lille jusqu'à la Loire en passant par les deux clubs parisiens, il n'est pas rare de voir des supporters porter les couleurs du club phare de l'east-end.

 

EAST END OI!

La carrière de Cockney Rejects sera toujours liée de près à leur soutien inconditionnel au club de l'East-end. En effet, tous 3 hooligans à Upton Park, ils mettent un point d'honneur (par les photos sur les pochettes de leurs disques, les écharpes au concert, et finalement le 45T reprise de l'hymne “blowing...” suivi de “We are the firm” et “War on the terraces” ) à ce que tout le monde soit au courant de leurs convictions footballistiques. Et si la reprise de l'hymne du club sera leur disque le plus vendu, ce sera également malheureusement le début de la fin. En effet, un mois après la sortie du disque, les cockneys jouent au Cedar Club à Birmingham et les quelques 200 skins (!) qui ne portent pas West-Ham dans leur coeur leur balancent dès les premiers morceaux tout ce qu'ils ont sous la main. Ça se termine en bagarre générale entre le groupe, ses suiveurs et les locaux. Le van du groupe sera défoncé ainsi que pas mal de matos. Quelques mois plus tard, à l'automne 80, la tournée de “Greatest hits vol 2” sera interrompue après quelques dates à cause de nombreux problèmes, notamment un concert à Liverpool qui se termine en bagarre générale toujours pour les mêmes raisons. Il sera d'ailleurs très difficile pour le groupe de se produire, ce sera même impossible en dehors de Londres. Cette tournée sera leur dernière.

D'autres groupes connaîtront le même genre de problèmes, par exemple, au concert de Acklam Hall en 1981 où jouent The Last Resort, Anti-Establishment et Infa-Riot. Le public local (Ladbroke groove) croyant être envahi par des fans de West-Ham, décident de foutre en l'air le concert. Apparemment, les gars se faisaient des idées puisque West-Ham jouait en même temps à domicile et Roi Pearce, le chanteur de Last Resort, était fan de Millwall, les autres groupes n'ayant pas d'affinités particulières.

Les Cockneys, cependant, ne sont pas le seul groupe supporter de West-Ham même s'ils sont les plus démonstratifs. Ce ne sont pas non plus les premiers : en février 78 , Cock Sparrer sont présentés dans NME comme les West-Ham bootboys. Ils seront cependant plus discrets, puisque si la pochette du EP “Running Riot” représente un envahissement de terrain à Upton Park, ce n'est pas explicite et les photos avec les écharpes ne figurent pas sur les disques.

De tout temps, Micky Fitz des Business portera régulièrement en concert le maillot des hammers, le groupe a d'ailleurs plusieurs chansons sur le foot, de “Saturday's heros” à “Southgate 96” en passant par “Maradonna“.

Les 4-Skins eux bien qu'originaires de l'East End prendront soin de ne pas afficher leurs préférences afin de ne pas connaître les mêmes problèmes que Cockney Rejects.